Rendons à César ce qui est à César, je dois ma découverte du jour à Facebook. De l'intérêt de suivre des pages thématiques...
Au détour de mon fil d'actualité, que vois-je ? Un bleu sépulcral, soyeux et féerique à la fois. Un mausolée à l'antique émergeant des cyprès, une atmosphère que Böcklin lui-même ne renierait pas. Bref, je tombe sous le charme de The Mysterious portal, un pastel du baron Arild Rosenkrantz, nom peu mélodieux s'il en est qui n'est dissimule pas moins un délicieux talent.
The Mysterious Portal
Pastel - vers 1938
Leicester Galleries
Andersen, Hendrik C., Portrait du Baron Arild Rosenkrantz
1897
Museo H. C. Andersen
Le petit Arild voit le jour le 9 avril 1870 dans le château de Frederiksborg, au Danemark. Son père, le baron Iver Holger Rosenkrantz, un diplomate danois, décède trois ans plus tard et l'enfant accompagne donc sa mère, Julia Louise Mackenzie, écossaise d'origine, dans ses nombreux voyages en Italie, en Angleterre et en Ecosse. Julia en vient finalement à épouser en secondes noces l'un de ses cousins et s'installe définitivement en Italie en 1891.
En 1887, Arild est envoyé à Rome pour suivre l'enseignement du peintre-fresquiste Modesto Faustini qui lui transmet son goût des grands maîtres italiens. Arild pose alors les bases de son style onirique et puissamment délicat.
Deux années plus tard, il intègre l'Académie Julian, à Paris, où il a pour professeurs Jean-Paul Laurens et Benjamin Constant. Il s’imprègne aussi bien du style des peintres des Salons et des Impressionnistes que du Préraphaélisme et de l'art de Turner ou de Blake.
Drapez-vous dans votre toga pura, tressez quelques géranium cueillis à nos balcons et courez, courez sur les petits sentiers de nos forêts ancestrales à la rencontre de l'énergie sylvestre. Car oui, mes amis, le temps de la célébration est venu. Une célébration tout droit sortie du paganisme antique, en particulier romain (bien qu'en la matière, il soit nettement teinté de traditions celtiques...).
Figurez-vous que depuis hier, dimanche 19 juillet, et jusqu'à demain, mardi 21 juillet, nous sommes en droit, pour notre bon plaisir, de célébrer les Lucaria, fêtes et jours fériés du calendrier de la Rome antique dédiés aux bosquets et aux espaces forestiers ; le terme lui-même étant formé à partir du mot lucus signifiant originellement "clairière dans un bois" et par extension "bois sacré".
Malheureusement, les auteurs latins ne nous ont transmis que très peu d'informations sur les principes et fonctionnements des ses célébrations. Il semble cependant qu'elles aient eu à l'origine pour fonction de commémorer la défaite de la bataille de l'Allia, datée de 390 (387 ?) av. JC. Les Gaulois (des Sénons, en l'occurrence), emmenés par leur célèbre chef Brennus, pénètrent en Italie et mettent une dérouillée d'enfer aux Romains, aux abords du fleuve Allia, avant de marcher sur Rome.
(Les Gaulois) En vue de Rome, Evariste-Vital Luminais
Huile sur toile - 1870
Musée des Beaux-Arts de Nancy
La Ville est abandonnée au pillage et la population se réfugie sur la citadelle du Capitole (voir les épisodes des Oies du Capitoleet de l'épée de Brennus... et oui, tout est lié mais là, on s’éloignerait un peu du sujet initial). Autant dire que l'événement laissa un goût amer aux Romains qui n'aiment pas bien que des barbares viennent piétiner leur plates bandes... Le jour fut déclaré néfaste, c'est-à-dire férié, et s'accompagnait de réjouissances publiques : une commémoration semble, en effet, avoir été instituée que l'on célébrait dans une vaste clairière située non loin du champ de bataille.
Le Bois sacré, Arnold Böcklin
Huile sur toile - 1882
Kunstmuseum, Öffentliche Kunstsammlung, Basle, Allemagne
Dans Fêtes romaines d'été et d'automne, suivi de Dix questions romaines, Dumézil explique que les Lucaria seraient davantage, et comme bien d'autres festivités, des pratiques religieuses saisonnières, liées en l'occurrence au temps des travaux d'essartage. Celui-ci consiste à éclaircir les bois pour y créer des clairières, donc des terres cultivables, et doit être effectué pendant la lune décroissante de juillet. L'auteur précise que les célébrations, et les sacrifices qui les accompagnaient, se déroulaient sur deux journées impaires, séparée par un intervalle d'une journée paire. Ces deux fêtes correspondraient aux deux techniques utilisées alors pour l'essartage : le rasage des arbres au pied et le déracinage, chaque technique exigeant certains rituels. Il s'agirait donc de fêtes du travail rural ayant pour fonction d'encadrer l'organisation du labeur des paysans, tout comme les Furrinalia, qui accompagnaient le forages de puits, ou les Volcania qui visaient à prévenir les incendies.
Hamadryade,
John William Waterhouse
Huile sur toile - 1895
Plymouth City Museum and Art Gallery
Les Lucaria en tant qu'elles accompagnent des travaux d'exploitation des forêts ont une dimension profane et économique. Mais elles n'en demeurent pas moins des célébrations sacrées destinées à la vénération d'une divinité. Car tout le problème vient de ce que, à Rome, le monde n'est pas encore désenchanté et "personne n'était jamais sûr que le bois qu'il rencontrait n'abritait pas ce que nous appellerions des esprits" (Dumézil, op. cit.). La clairière, au sens propre, est ici un espace déboisé par l'homme et donc une appropriation du sol ; sa création suppose donc quelque révérence à l'égard des esprits des bois, qu'i(s)l soit identifié(s) ou pas. Car, comme le dit si bien Dumézil, le déboisage ou "toute atteinte au séjour des dieux inconnus" entraîne de nécessaires "risques religieux".
Dans le De rustica (139,140), Caton précise ainsi quel type de prière doit accompagner le sacrifice expiatoire du porc auquel doit procéder le bûcheron avant d'entamer le bois : "Qui que tu sois, dieu ou déesse, toi à qui ce lieu est consacré, qu'il soit suffisant qu'on sacrifie un porc en offrande expiatoire, en vue de faire violence à ce lieu consacré." Simples mesures de précaution, ces pratiques religieuses tombèrent probablement en désuétude à force de progression de l'espace civilisé sur le monde sauvage. En effet, si dans les temps primitifs, le déboisement était la condition sine qua non de l'installation et du développement des populations du Latium, celui-ci ne présenta plus par la suite qu'un simple attrait économique : l'extension du domaine cultivable des villa.
Et c'est ainsi que des rites ancestraux, liés au monde agricole, se sont chargés a posteriori d'une symbolique politique (au sens large) tout autre : la commémoration de la bataille de l'Allia au cours de laquelle les troupes fuyant l'ennemi trouvèrent refuge dans les bois et donc bénéficièrent de l'hospitalité des esprits sylvestres. La boucle est bouclée, et la proverbiale densité de le religion romaine une fois de plus démontrée. CQFD.
Et l'homme du jour est... l'inénarrable empereur Néron (54 à 68 ap.JC). Neveu de Caligula et orphelin de père à trois ans, il fut poussé au pouvoir par sa mère, la délicieuse Agrippine, qui "joignait à une grande beauté l'esprit le plus artificieux, les moeurs les plus dissolues et une froide cruauté". A force de machinations et d'empoisonnements, elle parvient à éliminer son second époux, l'empereur Claude, ainsi que Britannicus, l'héritier naturel.
Autant dire que le petit Néron avait de qui tenir et qu'une fois parvenu au pouvoir, il s'en donna à cœur joie. Il sut combler jusqu'à plus soif ses désirs (et nécessités) de vengeance ainsi que son goût immodéré du luxe, ainsi qu'une nette tendance à la cruauté gratuite. Mais la biographie de notre joyeux tyran, à la popularité pourtant bien établie, n'est pas ici notre propos... Pour en apprendre davantage sur l'homme et ses actes de bravoures (ou pas) je vous conseille, notamment, la lecture de cette page.
Non, le véritable sujet de cet article est une commémoration. Celle d'un bien triste événement ma foi, puisqu'il fit des milliers de victimes et qu'il dévasta une grande partie de la Ville Éternelle, je veux bien sûr parler du célèbre incendie de Rome, qui démarra au jour du 18 juillet 64 ap. JC pour ne s'achever que six jours plus tard. Si l'épicentre de l'incendie se situe apparemment dans une petite boutique du mont Palatin, le vent a tôt fait de répandre et de gonfler les flammes qui rongent près d'un tiers de la ville sous les hurlements incessants des fuyards (voir la description de l'événement faite par Tacite dans les Annales). [Autant vous dire que niveau canicule, nos températures actuelles c'est de la rigolade à côté de ce gigantesque barbecue antique].
Rome ne s'est pas (re)faite en un jour. Palais, bâtiments publics, monuments en tous genres et insulae furent progressivement reconstruis. Néron profita de l'occasion/eu l'opportunité de/se dit que finalement c'était peut-être une bonne idée de se faire construire une nouvelle résidence, la Maison Dorée ou Domus Aurea, dont les vestiges ne furent redécouverts qu'au début du XXe siècle.
Pour une présentation plus approfondie de la Domus Aurea, je vous conseille le visionnage de ce documentaire (en italien) présentant une reconstitution en 3D du bâtiment :
Je vous invite également à parcourir le site Web consacré au chantier de restauration du palais :
Mais l'histoire ne s'arrête pas à ces considérations architecturales et urbanistiques... non, non, non. Car pendant qu'on empile moellons et mortiers, l'opinion publique marmonne... et réclame que des têtes tombent (déjà) en dédommagement du cataclysme urbain.
Sa réputation le précédent, l'empereur Néron est rapidement pointé du doigt, d'aucun jugeant qu'il aurait intentionnellement déclenché l'incendie : caprice architectural, nettoyage par le vide, sadisme ou ennui profond, les raisons d'une telle trahison ne manquent pas à qui souhaite en trouver. Les théories du complot, après tout, ça ne date pas de Roswell. De nombreux auteurs, tels que Pline l'Ancien ou plus tard Tacite et Suétone, semblent eux aussi convaincus de cette théorie : Néron ayant notamment voulu se venger de la plèbe pour avoir pris parti pour Octavie contre Poppée (épouses successives de l'empereur... mais c'est une autre histoire...)
Mesurant l'ampleur de l'hostilité populaire, Néron laisse accuser les chrétiens, boucs émissaires naturels, fraîchement établis et proliférant au sein de l'Empire, en particulier dans Rome. Le principal tort de la communauté, et de la religion qui la fonde, étant cette vilaine tendance à vouloir convertir des païens à tours de bras. Et détourner les citoyens du culte officiel n'est jamais vu d'un très bon œil chez les romains.
Il faut dire également que quelques antécédents malheureux jouaient en leur défaveur : une émeute, accompagnée d'une tentative d'incendie, menée quelques années plus tôt, en 57 par une poignée de judéo-chrétiens ainsi qu'une seconde, éclatée en 62, dans le contexte de la répudiation d'Octavie... Notons également que l'Apocalyspe de saint Jean, rédigé quelques années plus tôt, prédisait la destruction par le feu de la ville aux sept collines... Bref, fauteurs de troubles, exaltés, oiseaux de mauvais augure et incendiaires, les chrétiens méritaient bien une petite vague de persécution, en guise d'avertissement, voire d'éradication si possible.
Dernières prières des martyrs chrétiens, Jean-Léon Gérôme
1883
Walters Art Museum, Baltimore
Les arrestations se multiplièrent et avec elles les modes de châtiments : certains furent crucifiés ou jetés aux bêtes dans l'arène, d'autres subirent la mise à mort thématique de l'incendiaire et furent brûlés vifs.
Enfin, pour l'anecdote, et contrairement à ce que retient la tradition chrétienne, les martyrs des saints Pierre et Paul ne seraient pas directement liés à cette vague de représailles au lendemain du Grand Incendie. Les persécutions de chrétiens au sein de l'Empire allant bon train déjà depuis quelques temps et ce jusqu'à l'adoption du christianisme comme religion officielle de l'Empire en 313 par Constantin.
Aujourd'hui, à découvrir sur le compte Pinterest du blog Anywhere out of the World, une petite sélection de peintures et de dessins par Paul Delaroche (de son vrai nom Hippolyte de La Roche), né le 17 juillet 1797.
Cet artiste à succès et fort influent du XIXe siècle est malheureusement peu valorisé de nos jours [ndlr...], alors je profite de ce jour anniversaire pour rendre hommage à l'auteur de cet incontournable tableau intitulé La Jeune Martyre, ou de la variation christique sur le thème de la mort d'Ophélie, dans un style proche des préraphaélites.
Peintre spécialisé dans le genre historique, ses oeuvres s'apparentent tantôt au romantisme par leur théâtralité, tantôt au classicisme par la primauté accordée au dessin, entre autres... Le réalisme et la précision de ces scènes ou "anecdoctes" historiques fascinent tout autant que le caractère dramatique de ses compositions.
Pour découvrir le tableau, cliquez sur l'image ci-dessous :
Voici qu'en me baladant sur les pages d'un célèbre site d'enchères en ligne(vous saurez sous peu le pourquoi de ces flâneries...), je suis tombée nez-à-nez avec cet étrange objet...
Cette petite boîte circulaire au couvercle en verre bombé bordé d'un galon de passementerie à franges d'un mordoré quelque peu défraîchi, abrite, en effet, une surprenante association d'éléments.
Dans un anneau de bois sombre garni de quatre cabochons de pierres dures turquoise, apparaît un petit crâne, probablement sculpté dans de l'os (de quoi, ça, l'histoire ne le dit pas...) et placé au-dessus d'une paire de tibias miniatures posés en sautoir. Dans l'espace supérieur se déroule un phylactère de papier portant une inscription manuscrite à l'encre noire : "Dent de Ste Appoline"... Bon sang mais c'est bien sûr ! Ce bizarroïde morceau de matière blanchâtre curieusement planté dans la partie inférieure du médaillon n'est rien d'autre... qu'une dent humaine ! Et pas n'importe laquelle, s'il vous plaît, il s'agit là d'une dent-relique réputée directement tombée de la mâchoire desainte Appoline, ou Apollonie, martyre du IIIe siècle et patronne des chirurgiens-dentistes.
Des mois que je tripote virtuellement le concept, que je l'épie de derrière mes autres posts en cours, que j'attends de le passer dans mon alambic philosophico-contemplatif personnel... N'essaie pas, fais le, comme dirait l'autre. Mon X-Wing à moi à la forme d'une notion tarte à la crème que j'entends bien arracher aux marais glauques de l'opinion commune ! ... tout un programme... suivez le guide.
Mon point zéro : l'exposition "Cluny 1120" qui s'est tenue jusqu'au 2 juillet dernier au Musée National du Moyen Âge - Thermes de Cluny(le MNMA, pour les intimes et ceux qui doivent utiliser le nom plus de trois fois sur une même page).
Anywhere entre dans la cours des grands ! ou du moins y fera une petite incursion...
Demain, première présentation presse ! et croyez-le, croyez-le pas, l’évènement en question n'est autre que la nouvelle exposition du Musée National du Moyen Âge : "Cluny, 1120. Au seuil de la Major Ecclesia". Personnellement, je trouve qu'on frôle le prophétique...
Pour vous mettre en appétit, quelques notions et mots-clefs qu'un très prochain article de votre humble servante tâchera de remettre en ordre pour le plus grand plaisir de vos yeux et de vos méninges :
Art roman
Cluny III
Grand portail
Démolition
Archéologie
Technologies numériques
Reconstitution
Au programme, donc, science et expérience de la monumentalité. What else ?
La suite au prochain numéro et, d'ici là, sus à la sculpture romane !... parce que, l'air de rien, c'est le moment de réviser mes classiques...
Le 20 mars, jour du plantoir (tout le charme rustique du calendrier révolutionnaire...), marque comme vous le savez le début du printemps dans notre hémisphère. Alors pour célébrer cette régénération en marche, je vous propose l'image suivante :
Chien poursuivant un lièvre (détail de la bordure inférieure)
Bréviaire franciscain - ms.0004, f.319v
prov. Milan / v.1430
Bibliothèque municipal de Chambéry
Pourquoi, me direz-vous ? Certes, rameaux fleuris et choux romanesco ne sont pas sans évoquer ici les beautés de la Nature au sortir de sa léthargie, mais les manuscrits médiévaux foisonnent de représentations sans doute plus éloquentes... Non. Le véritable enjeu du présent billet est en réalité ce lièvre, saisi ici dans le mouvement bondissant de la course car tentant d'échapper aux crocs du chien qui le poursuit.
Comme il me faut toujours une raison à tout, et pour ne pas écrire comme on court sur un tapis d'entraînement, je rôdais sur le net... je chassais... un déclic, une association d'idées, une image qui me ferait de l'oeil...
Eureka !! Hier c'était le 12 mars ! Jour de la mort de Grégoire Ier le Grand (540-604), glorieux pape du VIe siècle sans qui bien des étudiants en histoire de l'art n'auraient pu rédiger leurs introductions... car rappelons que, notre Grégoire, chef de projet d'une réforme éponyme, est également l'illustre auteur des fameuses lettres à l'évêque Serenus de Marseille, de 599 et 600, qui développent l'argumentation canonique en faveur de la fonction pédagogique des images : « les images doivent être placées dans les églises, afin que ceux qui ne savent pas les lettres lisent toutefois en regardant sur les parois ce qu'ils ne peuvent lire dans les livres », la Bible illustrée, tout ça, tout ça... Autant dire que Grégoire, c'est un peu la tarte à la crème de l'iconographie... mais c'est pour ça qu'on l'aime...
Alors, pour célébrer dignement cette pop star de l'histoire des images, j'ai décidé de me pencher sur l'iconographie de la Messe de saint Grégoire, sujet hybride qui se diffuse dans les arts à partir du XIVe siècle et associe la figure du saint pape au thème du Christ souffrant.
Loin du grand et du petit écran, l'exposition organisée par le musée de la Poste nous invite aussi à découvrir la réalité historique au-delà du fantasme pour interroger la relation d'implication réciproque qui, somme toute, les unit. De la poule ou de l'oeuf...
Ce troisième temps de l'exposition se concentre sur les grands procès pour sorcellerie que connut la France du XVIIe siècle, mais par souci de clarté (et monomanie médiévalisante), je me propose de produire tout d'abord un bref résumé du pourquoi-du-comment-on-en-est-arrivé-là...ou du moins de ce que j'en ai compris...
Divination : Magicien invoquant des démons
Angleterre - vers 1360-1375
British Library, ms. Royal 6 E VI - f.535v
Les "chasses aux sorcières" ne voient le jour en Europe qu'au XIVe siècle où elles sont organisées aussi bien par l'Eglise que par le pouvoir séculier. En effet, si les procès pour sorcellerie étaient menés par l'officialité (le tribunal ecclésiastique), la peine de mort, elle, ne pouvait être prononcée que par les magistrats siégeant aux tribunaux laïcs. De plus, les procès en sorcellerie ne visaient pas seulement à défendre la Foi mais également à réprimer ces êtres nuisibles qui, "causant dommage aux biens et aux personnes", portent préjudice au roi, en la personne de ses sujets.
Cautionnant elle-même de nombreux miracles et autres pratiques thaumaturgiques, l'Eglise s'était jusque là montrée plutôt tolérante à l'égard des guérisseurs. Elle avait également concouru au développement du savoir astrologique et à la naissance du concept de "magie naturelle" au sein de l'Université. Les autorités ecclésiastiques demeuraient en réalité sceptiques quant à l'efficacité réelle des pratiques magiques et ne combattaient pas tant les puissances maléfiques que le fait de croire en leur existence.