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vendredi 6 août 2010

Le vieux plomb de la semaine

Enseigne de pèlerinage de Notre-Dame de Chartres


Oyez, oyez braves gens ! Voici que le maître des lieux (en l'occurrence moi) inaugure une nouvelle rubrique vouée à devenir hebdomadaire : "Le vieux plomb de la semaine".

Qu'est-ce à dire me direz-vous ? L'enjeu est ici de vous faire découvrir le sujet de toutes mes recherches de ces deux dernières années : les "plombs historiés", en particulier les enseignes (sortes des badges) et méreaux (objets monétiformes) de la fin du Moyen Âge, soit produits entre le XIIIe et le XVe siècle. Mais ne vous inquiétez pas, tout deviendra clair en temps et en heure...

Pour commencer cette immersion dans un quotidien médiéval peu connu, je vous propose cette enseigne de pèlerinage provenant du sanctuaire de Notre-Dame de Chartres probablement réalisée entre le fin du XIIIe siècle et la seconde moitié du XIVe. Actuellement conservée au musée Carnavalet, elle fut redécouverte par Arthur Forgeais, archéologue amateur et collectionneur de son état, dans la lit de la Seine au milieu du XIXe siècle.






L'avers de cette pièce réalisée dans un alliage de plomb moulé figure une Vierge en majesté coiffée d’une couronne fleurdelisée et portant sur la poitrine un médaillon quadrilobé, sans doute un fermail qui maintient le manteau qui lui convre les épaules. Elle tient un sceptre fleurdelisé et porte sur ses genoux l'Enfant Jésus, lequel fait un geste de bénédiction. Un personnage agenouillé en signe d'imploration est figuré à dextre du couple divin.
Il semble que cette image de la Vierge à l'Enfant prenne pour modèle une Vierge sculptée, aujourd’hui disparue, connue sous le nom de Notre-Dame-Sous-Terre, qui était présentée à la vénération des fidèles dans la crypte extérieure de la cathédrale.

Sur le pourtour de l'enseigne, qui mesure environ 5cm de haut, on relève l'incription suivante : SBEATA.MARIE.CARNOTESIS
Celle-ci permet d'identifier l'origine de cette "relique indirecte" produite sur le lieu même du sanctuaire.

La pièce, une plaque rectangulaire sommée d'un pignon dont les versant sont ornés de crochets et de clochetons, pourrait évoquer la forme d'un reliquaire. Aux angles, on aperçoit des petits annelets qui permettaient de coudre l'enseigne sur les vêtements du porteur ce qui,  d'une part, attestait de l'accomplissement du pèlerinage et apportait, d'autre part, une protection au pèlerin.

Passons maintenant au revers... en effet, fait étrange pour une enseigne, pas essence destinée à être fixée sur le haut du vêtement ou le revers du chapeau, ce type d'enseignes provenant de la cathédrale de Chartres présentent un décor historié, relativement élaboré sur leurs DEUX faces.


Le revers évoque ici la relique qui fit, en autres, la célébrité du sanctuaire de Chartres qui devint un lieu de halte incontournable sur le chemin vers Saint-Jacques de Compostelle : la Camisa, chemise ou tunique de la Vierge. Celle-ci aurait été offerte à la cathédrale en 876 par Charles le Chauve.
Ici, au-dessus de la Tunique déployée est figurée la châsse qui contenait la relique tandis que dans la partie inférieure apparaît un denier chartrain.

L'enseigne de pèlerinage de Notre-Dame de Chartres présente la caractéristique de figurer deux objets de dévotion majeurs dans l'histoire du sanctuaire : la figuration sculptée dans un style archaïque d'une Vierge en majesté et la relique de la Tunique de Vierge. En achetant cet objet, produit quasiment en série dans un alliage somme tout commun, le pèlerin conservait comme un lien spirituel avec le sanctuaire. L'enseigne devenait alors un objet de dévotion quotidienne et signifiait ainsi quelque chose de l'identité du porteur.

La prochaine fois, promis, je vous dis tout des méreaux...

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